Extrait de Le chemin du purgatoire, L’Harmattan, 2013
C’est l’année suivante, le 23 octobre 1922, que François-Xavier acquiert l’usine à gaz de Pithiviers. Il a alors 47 ans. Une carte postale du début du 20e siècle révèle un bâtiment de modestes dimensions : vingt-cinq mètres de long, tout au plus, avec une grande cheminée. Des personnages s’affairent dans la cour : six ouvriers fixent l’objectif. Tourné vers eux, un homme en tenue de ville, coiffé d’un chapeau blanc à larges bords, un document à la main, semble leur donner des instructions.
Aux Archives départementales du Loiret, j’ai eu entre les mains une lettre dactylographiée du 26 décembre 1922 adressée au préfet. En en-tête : Éclairage, Cuisine, Chauffage, Force motrice – Vente de coke et goudron. François-Xavier expose qu’il aurait désiré, « pour établir un travail rationnel et donner satisfaction à la clientèle, déplacer le cassage du coke et faire installer un matériel moderne répondant à tous les besoins ». Puis il sollicite l’autorisation de procéder à cette « nécessaire transformation ». Je reconnais la signature de François-Xavier ; mon père en avait conservé le tampon qu’il utilisait notamment pour marquer ses livres. À cette lettre est joint un plan : un bâtiment pour les fours et le magasin (qui pourrait être celui de la carte postale) ; une « cour aux gazomètres » ; deux ensembles bureaux-habitations-jardin dont l’un donne sur la rue de Chartres et qui devait être l’habitation de la famille Gagnieux ; puis des hangars, des remises et un concasseur à coke.
Au début des années 1920, l’utilisation du gaz par les ménages connaît son apogée. Or, le Ministère du Travail, dans une lettre du 18 janvier 1923 relative à la demande d’autorisation de François-Xavier, estime que « l’usine ne paraît pas susceptible de se développer, l’éclairage électrique devant dans beaucoup de maisons remplacer l’éclairage au gaz ».
C’est dans ce contexte que se situe l’acquisition par François-Xavier de l’usine à gaz de Pithiviers, production proche du déclin, reléguée à la périphérie des villes, car malodorante et inflammable. Ainsi, charrois de houille, fours de distillation, cuves, gazomètres et visages noircis constituent dorénavant le quotidien de la famille Gagnieux.
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Voir aussi : François-Xavier perd devant le Conseil d’État
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