Réponse du commandant Henry du 12 novembre 1945
À titre de commandant du 1er bataillon du 2e Régiment F.F.I. Armor, Robert HENRY avait été le supérieur hiérarchique de Serge (voir l’article Serge JEANDOT, résistant) ; il demeurait alors 16 avenue Louise à Villemomble (Seine-Saint-Denis).
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Mon cher Serge,
C’est avec plaisir que je viens de lire ta lettre du 7. Tu m’excuseras de ne point avoir répondu à la précédente, mais, durant ces derniers temps, je me suis trouvé comme frappé d’amnésie : impossible de mettre une idée devant l’autre ; je ne parvenais plus à condenser mes pensées, moi qui, jusqu’à présent avais la plume facile !
Samedi dernier, je me suis décidé à mettre à jour tout le travail personnel que j’avais laissé s’accumuler depuis des semaines. J’ai débuté par le journal de marche du bataillon, pour continuer par les citations. Dès que je suis arrivé à créer l’ambiance, la chose a été toute seule et les idées ont retrouvé leur fluidité d’antan. Je n’ai fait que 4 propositions de citation, dont une à ton sujet. J’espère fermement que cette fois-ci, elle sortira !
Tu me demandes conseil au sujet d’une affectation en Extrême-Orient ! Tu es militaire et tu veux le rester : ton intérêt est donc de faire tout ce qui est en ton pouvoir pour réussir. Or, de l’avis de tous mes camarades et amis, le départ aux colonies, pour un militaire, est une question qui s’impose en vue d’un avancement certain ! A mon avis, tu dois envisager tôt ou tard cette solution, et le plus tôt serait certainement le mieux.
Toutefois, il faut envisager qu’à nouveau tu vas changer de service : quitter la SNCF pour la sécurité militaire ! A-t-on absolument besoin de toi, dans le service où tu te trouves, on peut ne pas être content et tes notes pourraient en souffrir ! C’est une question à examiner, mais elle ne doit pas être insoluble !
Malheureusement le Colonel Bernard est absent pour plusieurs jours, sans quoi je serais allé lui demander conseil.
Marie-Thérèse est au lit depuis 2 mois, dans l’impossibilité de bouger : c’est une sciatique dit-on ! Mais nous craignons hélas que ce ne soit quelque chose de plus grave. En tous les cas, l’ami Cléret de Bondy la prend demain matin en auto, pour la conduire à l’hôpital, où nous craignons malheureusement qu’elle ne soit obligée de rester !
Je pars demain pour 8 jours (Verdun, Metz, Nancy). Je vais pouvoir me reposer, tout au moins me changer les idées.
Au revoir, mon cher ami, bonne santé, bon travail, bon moral et à bientôt le plaisir de te revoir.
Amicalement à toi.
[signé : Henri]