Lettre du 27 octobre 1945
Mulhouse le 27/10/1945
Très chers parents, très chère sœur.
De retour de la Sous-Commission N° 9 de Mulhouse, je trouve aujourd’hui un instant de liberté pour vous envoyer de mes nouvelles qui ne sont pas trop mauvaises.
En ce qui concerne ma nomination, je n’ai encore rien reçu. Il est vrai qu’il faut qu’elle passe par la Région puis par la Commission centrale des Chemins de Fer, puis par la C.R.E. avant d’arriver jusqu’à moi, donc une attente d’au moins une quinzaine de jours. Si j’avais su cela, je serais resté à Paris jusqu’au lundi soir pour revenir à la Sous-Commission avec le papier en poche. S’il n’y avait que cela, cela irait encore mais je ne peux faire aucune demande de mutation tant que cette situation durera, et cela m’ennuie beaucoup du fait qu’un nombre de notes intéressant les officiers d’active arrivent tous les jours. Question Intendance, je ne peux pas toucher ma solde et j’attends en ce moment. 1) la solde du mois de Septembre et d’Octobre 2) ma mise de 1er équipement de l’ordre de 5 000 francs et mon rappel de solde compris entre le 15 avril 1945 et le mois de Septembre ce qui est équivaut à la somme globale de 20 000 francs, due par l’Intendance. Alors, je tire le plus possible sur ce qu’il me reste en poche et ce n’est pas énorme.
A ce sujet là j’ai envoyé deux lettres au Commandant Henry [1]. La première expédiée de Belfort, le remerciait de tout ce qu’il avait fait pour moi lors de mes démarches et la seconde envoyée il y a deux jours le priant si possible de se renseigner au Ministère sur ma nomination. J’espère recevoir une réponse ; il n’y a rien de plus énervant que d’attendre tous les jours une chose qui ne vient pas.
Lorsque ce papier tant attendu daignera arriver jusqu’à moi, je poserais une demande de mutation pour l’Indochine. L’avancement est beaucoup plus rapide là-bas et pour un jeune officier d’active, la métropole n’offre pas beaucoup d’avantages. Enfin, nous en reparlerons lorsque la situation sera éclaircie pour de bon.
A part cela tout va bien. Le temps est magnifique aujourd’hui quoique la température soit un peu fraîche. Je terminerai cette courte lettre en espérant qu’elle vous trouvera tous en excellente santé. De mon côté, elle en est de même. Je vous embrasse tous bien fort.
Serge
Sous-Lieutenant Jeandot Serge
Commissariat Militaire
Gare de Mulhouse (Haut-Rhin)
Notes :
1. À titre de commandant du 1er bataillon du 2e Régiment F.F.I. Armor, Robert HENRY avait été le supérieur hiérarchique de Serge (voir l’article Serge JEANDOT, résistant) ; il demeurait alors 16 avenue Louise à Villemomble (Seine-Saint-Denis).